Adolph Hitler


En 1933, les Dupras apprennent qu’un certain Hitler est nommé Chancelier de l’Allemagne. Ils ont peu entendu parler de lui, préoccupés qu’ils sont de bâtir leur commerce. Mais ils vont rapidement se rendre compte de la notoriété grandissante du personnage en raison des inquiétudes que suscitent ses activités « révolutionnaires » dans son pays. On craint une nouvelle guerre si les Allemands se réarment. Charles-Émile doute que cela soit possible. Il se souvient en effet de ce que lui disait son père Wilfrid sur la gravité de la première guerre mondiale et il ne voit tout simplement pas la menace se profiler à l’horizon.

Adolph Hitler, enfant illégitime (le terme que l’on employait à l’époque), est né en Autriche en 1889. Il quitte l’école à 16 ans et s’inscrit à l’Académie des Beaux-Arts de Vienne qui lui refuse l’admission. Orphelin à 18 ans, il a un appétit féroce pour tout ce qui est lecture. Sans argent, il se fait quelques sous en vendant ses dessins et tableaux et trouve un refuge pour hommes seuls où il logera pendant deux ans. À 21 ans, il s’intéresse à la politique. Il prend conscience de l’antisémitisme qui règne ouvertement à Vienne et il trouve cela incorrect. Il part pour l’Allemagne à 24 ans et s’installe à Munich. La guerre de 1914 déclarée, il s’enrôle volontairement dans le régiment allemand de la Bavière. Il est nommé caporal. Blessé, il guérit et retourne au front en mars 1917. Il est décoré par la suite de la Croix de Fer, 1ière classe, décoration rarement accordée à un fantassin.

En novembre 1918, le Kaiser et la maison royale de Hollenzollern s’effondrent. L’Allemagne devient une république. Quelques jours plus tard, les généraux allemands proposent un armistice aux Alliés à condition que l’armée allemande demeure intacte et ne soit pas contrainte à reconnaître la défaite. Les Alliés refusent. Avec le traité de Versailles, l’Allemagne est reconnue responsable d’avoir causé la guerre et condamnée à payer 33 milliards de dollars à titre de réparations, en plus de devoir céder des portions de son territoire à la France et à la Pologne, d’accepter la création d’une zone démilitarisée aux frontières de la France et de limiter son armée à 100,000 hommes, sans sous-marins ni avions.

Révolté, Hitler dénonce publiquement le traité et ses responsables, qu’il accuse d’être des juifs et des marxistes. L’armée reconnaît ses talents et l’assigne pour endoctriner les prisonniers allemands rentrés au pays, contre les dangers du communisme et du pacifisme. Il quitte l’armée en 1919 et se joint au petit Parti des Travailleurs dont l’objectif ressemble à ce qu’il prêche. Il a trouvé sa vocation. Membre du directoire, il réorganise le parti, choisit comme symbole la croix gammée et en change le nom pour « Nazionalsozialistische », d’où le surnom de « parti nazi ». Les foules courent ses assemblées qui dépassent rapidement les six mille personnes, attirées par ses talents d’orateur. Finalement, il devient le chef du parti. Avec la crise de 1929, l’inflation, venue gonfler les sommes que l’Allemagne doit verser en réparations de guerre, achève de ruiner le pays. Hitler y voit sa chance. Il fomente un complot pour enlever les leaders du gouvernement et les contraindre à le nommer à la tête de l’État. La pièce maîtresse de son dispositif : l’envoi de ses troupes partisanes, les SA (son armée privée, aussi appelée « les chemises brunes ») et les SS (sa garde privée) sur les places publiques. Mais le coup échoue et Hitler est arrêté. Son procès pour trahison est suivi de près par la presse. Ayant choisi de se défendre lui-même, il en profite pour propager ses idées politiques. L’impact est national. Vivement impressionnés, ses juges ne le condamnent qu’à 5 ans de prison, avec liberté conditionnelle au bout de six mois. C’est en prison qu’il dictera à Rudoph Hess le contenu de « Mein Kampf », l’ouvrage dans lequel il fait l’apologie de la race Aryenne (race blanche pure), supérieure selon lui à toutes les autres et définit les races inférieures : les juifs, les peuples slaves (particulièrement les Tchèques, les Polonais et les Russes). Ce livre, mal écrit, révèle la véritable nature du personnage et ses plans pour la future Allemagne, en plus de constituer un avertissement au reste du monde. Un avertissement qui demeurera globalement ignoré.

À sa sortie de prison, Hitler propose de renverser le gouvernement de manière démocratique, en se faisant élire. Les élections du 14 septembre 1930 donnent au parti Nazi 18 % des votes et 107 députés au Reichstag. Il devient le deuxième parti en importance. En 1932, à l’élection présidentielle, le vieux président Hindenburg ne mène aucune campagne. Hitler décide de se présenter contre lui sous le thème « Liberté et Pain ». Son communicateur, Joseph Goebbels, déclenche une furieuse campagne de propagande, dépassant en intensité celle de 1930. Cela n’empêchera pas Hindenburg de l’emporter avec 53 % des suffrages. Le Chancelier Bruening profite de la situation pour bannir les troupes SA et SS de Hitler. Il se retrouve vite au milieu d’une tempête de protestations qui le contraint à la démission. De nouvelles élections législatives sont déclenchées à l’issue desquelles le parti Nazi obtient 230 sièges sur 620, devenant ainsi le parti le plus important. Finalement, après de longues intrigues et des alliances de toutes sortes, le président Hindenburg, qui s’était toujours opposé à cette idée, nomme Adolf Hitler Chancelier de l’Allemagne, le 30 janvier 1933. « Enfin, j’ai réussi ! » s’exclame-t-il.