Le club Richelieu-Lasalle


Lors de mon temps de collège, j’étais intrigué par le club Richelieu de Verdun.

C’est surtout par le journal « le Messager de Verdun » que j’apprenais ce qu’était ce club Richelieu-Verdun, les noms de ses membres, ses invités, ses actions caritatives… Ses activités étaient nombreuses et on pouvait penser qu’il s’y trouvait un groupe d’hommes très dynamiques qui représentaient la crème des hommes d’affaires et des professionnels de Verdun.

En 1959, un ami ingénieur, Laurent Gendron, membre du club, m’invite à un desdîners du club. J’accepte avec un grand plaisir et je trouve là une atmosphère de camaraderie exceptionnelle. Le président mène la réunion avec brio et les membres y participent activement. Ils se voient imposer des amendes pour toutes sortes de raisons plus folichonnes les une que les autres. Chacun contribue avec un grand sourire, à la satisfaction des autres, car tous savent que tous lesfonds recueillis sont dédiés à subvenir aux grands projets de charité du club qui visent à aider les jeunes défavorisés de la société verdunoise. La dîner se termine par le discours d’un conférencier, qui est normalement un personnage connu, au Québec, au Canada ou dans le monde. Les conférences sont intéressantes et ajoutent à l’épanouissement personnel, social et culturel des membres.

J’apprécie beaucoup cette première expérience. L’amitié et la fraternité qui se développent entre les membres sont uniques, les projets sont captivants et il est très agréable de contribuer avec les autres membres à une vie meilleure pour ceux qui souffrent.

Je fais application pour devenir membre du club et avec le parrainage de Laurent Gendron, je suis admis à l’automne de 1959.

Création de la Société Richelieu

La Société Richelieu a été créée par l’Ordre de Jacques Cartier, dont j’étais jadis membre, « pour aider les canadiens-français à conserver leur langue, leur culture et leur foi dans le contexte majoritairement anglophone de la réalité canadienne ». C’est un organisme laïc important dans le monde clérical des années ’40 à ’60. Fondé d’abord dans l’est de l’Ontario où les francophones vivent dans une société contrôlée par les anglophones, il est un lieu de rencontre propice pour le développement d’un sentiment nationaliste positif et actif. La création de clubs Richelieu s’étend, par la suite, au Québec et au Nouveau-Brunswick. Éventuellement, ils trouveront racines aux USA et dans les pays francophones de l’Europe et de l’Afrique.

Le club Richelieu-Verdun

Le club Richelieu de Verdun a été créé en avril 1949 et fut parrainé par le club Richelieu de Montréal.

Comme la Société Richelieu exige une période d’adaptation de quelques mois avant d’accorder la charte à un nouveau club, ce n’est que le 29 novembre 1949 que cette dernière est donnée au nouveau club de Verdun dont les fondateurs incluent : le Dr Eugène Thibault, l’industriel Armand Dupuis, le courtier en immeubles Jean Paul Gauthier, l’épicier Paul-Émile Joannette, le comptable agréé Lucien Viau, l’entrepreneur en pompes funèbres Irénée Thériault, l’imprimeur Jules Trudeau, C.A Gagnon, Léo Guimond, Armand Roussin, et C.A. Choquette.

Même si le club se situe à Verdun, où 40% de la population est anglaise, les membres du club ne ressentent pas que leur langue, leur culture ou leur foi sont en danger. Le fait, par exemple, que l’affichage dans la ville est à très grande majorité anglaise et le nom des commerces presque uniquement en anglais (même ceux des propriétaires francophones le sont) ne les frustrent pas. C’est une chose à changer mais peu de membres en parlent et vivent aisément avec cette situation bizarre. Le club Richelieu-Verdun ne fera jamais de campagne pour la changer. Il veut d’abord s’occuper à aider les plus pauvres, les plus démunis et les jeunes francophones qui ont besoin d’aide pour bien se préparer à la vie.

Par son programme et ses activités, le club Richelieu de Verdun devient vite un organisme parmi les plus importants de la troisième ville du Québec et un des clubs les plus actifs et productifs du Québec. Il ouvre un comptoir vestimentaire « l’Ouvroir » pour les pauvres et les sinistrés; lance une campagne de pain en 1953; achète un autobus pour un camp de vacances de jeunes. Il crée, en 1958, le Service Social Richelieu de Verdun qui, après 13 ans, est pris en charge par le gouvernement et en 1976, une fondation qui remettra plus de 1,3 millions $ aux plus démunis. Il s’impliquera dans l’organisation et le financement d’un camp de jeunes à St-Côme. En 1989, il lance l’harmonie Richelieu de Verdun.

J’aime bien le club et je ne manque jamais un de ses dîners qui ont lieu dans la salle du deuxième étage du restaurant Labelle Bar-B-Q, de la rue Wellington. On me demande même quelques fois de présenter un des conférenciers invités et je le fais en particulier pour Roger Baulu, le célèbre animateur de la radio et de la télévision canadienne.

Comme j’habite avec ma famille à Ville Lasalle depuis 1956, à Riverside Park, je me sens de plus en plus intégré à ma nouvelle ville. Au club Richelieu de Verdun, il y a aussi le grand Chagnon qui est membre et qui vit aussi à Riverside Park. Au début de l’été 1961, nous sommes à la même table lors d’un dîner et je lui lance l’idée de créer un club Richelieu à Ville Lasalle. Spontanément, il se montre favorable et me demande comment mettre le tout en action.

La fondation du club Richelieu-Lasalle

Suite à cette discussion, je rencontre Alphonse Lesage, commissaire à la Commission scolaire de Lasalle et grand chevalier des Chevaliers de Colomb de la ville. Il vit dans la paroisse Notre-Dame-du-Sacré-Cœur et a un gros mot à dire sur tout ce qui se passe dans sa région. La paroisse est le vieux Lasalle et la plus importante de la ville. Je lui explique ma proposition et lui suggère de se joindre à nous pour analyser la possibilité de créer un nouveau club Richelieu à Lasalle. Il accepte sur-le-champ et l’idée l’enthousiasme. Je fixe, pour le début août, une première rencontre au club de golf de Lasalle, appartenant à la famille Alepin, sur le boulevard Lasalle, et nous convenons de nous faire accompagner par quelques individus qui pourraient être intéressés par cette proposition.

Je parle à mon ami Basil Alepin, dont l’oncle est propriétaire du club de golf, et je lui demande de nous obtenir un salon au club. Il me confirme que la salle est réservée. J’arrive à la rencontre avec le grand Chagnon et un autre membre du club Richelieu de Verdun et y trouve une vingtaine d’individus dont trois ou quatre que j’avais invités moi-même.

Lesage est là et me présente certains de ses invités dont Émile Vézina, l’assureur Claude Sénécal, François Tremblay, le comptable Guy Bouchard, Sarto Thibault, le président de la commission scolaire Henri Lemieux et les autres. Je dirige la discussion qui porte sur l’opportunité de créer un club Richelieu à Lasalle et des possibilités qu’il puisse demeurer une entité bien vivante dans l’avenir. Les opinions sont toutes positives et il devient clair que non seulement le club réussira à se maintenir mais qu’il remplit un besoin de participation, de rencontres et de services à la communauté pour tous ces individus. J’avise les membres que j’ai obtenu la confirmation de Laurent Gendron que le club Richelieu-Verdun acceptera de parrainer un nouveau club à Lasalle et qu’en plus, si nécessaire, un ami, Bernard Grégoire, du club Richelieu-Montréal, m’avise que son club pourrait aussi nous parrainer comme il l’a fait jadis pour Verdun. Suite à la discussion, je suggère que l’assemblée soit ajournée d’une semaine afin que chacun ait l’occasion de bien réfléchir à la proposition, d’en parler avec ses amis et que nous nous rencontrions au même endroit la semaine suivante pour prendre la décision.

Durant la semaine, je rencontre plusieurs des participants et je comprends que l’idée fait bien son chemin. À la deuxième rencontre, nous sommes plus nombreux car quelques uns ont invité des amis. Tous acceptent, unanimement, l’idée de former un nouveau club Richelieu, le Club Richelieu-Lasalle.

Le premier club Richelieu-Lasalle, disons non-officiel, est mis sur pied et Lesage propose que François Tremblay soit le président. La proposition est acceptée à l’unanimité. La charte est émise, six mois plus tard, le 16 février 1962.Émile Vézina deviendra le nouveau président. Je quitte alors, officiellement, le Richelieu-Verdun pour me joindre au Richelieu-Lasalle.

Claude Sénécal sera président pour l’année 1963 et je le serai en 1964.

Le club Richelieu-Lasalle 1964

L’année pendant laquelle Claude Sénécal à la tête du club Richelieu-Lasalle fut un grand succès. Il a su maintenir et développer une fraternité réelle entre les membres qui peu à peu deviennent de bons amis. J’ai agi comme son vice-président et le temps est venu de prendre la relève pour l’année 1964. Une fête particulière pour la « remise des pouvoirs » au nouveau président et aux nouveaux officiers est organisée à l’Hôtel Holiday Inn. Plus de 125 personnes sont présentes dont les membres du Club, leurs épouses, plusieurs invités et quelques dignitaires dont le maire de Ville Lasalle, et nouveau membre du club, le Richelieu Lionel Boyer.

Le Richelieu Guy Bouchard fut déclaré alors comme le Richelieu de l’Année. Il fut le premier à recevoir cette appréciation.

Je suis assermenté comme président et Claude Sénécal me remet le maillet du président avec lequel je devrai maintenir l’ordre lors de nos dîners hebdomadaires en frappant la cloche richelieu monté d’un gros « R », qu’il me donne aussi. Le Richelieu Pierre Maynard est vice-président, le Richelieu Guy Bouchard, le trésorier alors que le Richelieu Paul Séguin et le Richelieu Marcel Brault deviennent membres de l’exécutif.

Mon premières paroles, comme président, sont pour transmettre à Claude Sénécal les félicitations et les remerciements de tous les membres pour son année à la présidence du Club et au nom de tous, je lui remet l’insigne Richelieu en or. Il a rendu un grand service au nouveau club en lui donnant une direction intelligente, motivante et solide.

Puis, suite à mon discours d’acceptation et de remerciement pour la confiance que l’on me témoignait, j’invite tous les membres à une journée d’étude en août pour discuter ensemble d’idées nouvelles en rapport avec l’orientation et l’organisation du club et pour déterminer la nature de la prochaine campagne de cueillette de fonds pour nos activités caritatives, le partage des taches, etc.

Cette première journée d’étude s’avérera très utile et efficace puisqu’ensemble nous avons établi les activités de l’année, l’organigramme des responsabilités et le calendrier de nos actions qui sera imprimé, combiné avec le bottin des membres et remis à chacun. Le responsable pour le choix des conférenciers est le Richelieu Jean Décarie et c’est au restaurant El Paso de Lachine que sera le point de rencontre des membres pour ces agapes. La campagne de charité en sera une de vente de cigares avec un objectif fixé très haut sous la responsabilité du Richelieu Gilles Beauchamp. Le Richelieu Paul Séguin dirigera la campagne de recrutement, le Richelieu Jules Poirier organisera le tournoi de golf sous la présidence de Charlie Hodge, le gardien de but du club de hockey Canadien, etc..

Les dîners Richelieu-Lasalle

Dès le premier diner Richelieu, les membres ont ressenti que l’année sera exceptionnel. Et cela grâce, en grande partie, au Richelieu Jean Décarie qui s’avère un as pour dénicher les conférenciers. Il les choisit en fonction des évènements qui marquent nos vies et n’hésite pas à appeler partout, à tous les niveaux. Il réussit même à parler au premier ministre Lester B. Pearson pour l’inviter comme conférencier. Malheureusement, le prix Nobel de la Paix se voit obligé de refuser à cause de ses importantes occupations. Ce qui était fort compréhensible. Parmi les conférenciers, on retrouve le cardinal Paul-Émile Léger, archevêque de Montréal, qui parla des oeuvres pour lesquelles il avait créé des corporations administratives. Il fut présenté par le Richelieu Lévis Sauvé, président de la commission scolaire de Lasalle et remercié par le Richelieu Lionel Boyer, maire de Ville Lasalle; Daniel Johnson (père), chef de l’opposition à l’assemblée législative de Québec et nouveau chef de l’Union Nationale qui nous parla des défis politiques; l’abbé Georges Matte, sexologue et animateur de l’émission de télévision du canal 10 « en ce temps-ci », qui avait intitulé sa causerie « Docteur, je ne veux plus d’enfant ». Il fut présenté par le Richelieu André Poupart; Gérard Delage, président du Conseil du tourisme du Québec et de l’Association des hôteliers et des restaurateurs du Québec, qui fut présenté par le Richelieu Armel Robitaille et remercié par le Richelieu Claude Lanthier; Gaston Naessens, biologiste français inventeur d’un sérum « Anablast » contre le cancer du sang (il fut accablé d’accusations de fumiste, mais il continua ses recherches en produisant un médicament anti-sida, qui demeure discutable et non approuvé par Santé-Canada); Reine Charrier, auteur du volume « rescapée de l’enfer nazi ». Elle fut présentée par le Richelieu le docteur Alban Cadieux et remercié par le Richelieu le docteur Cyrille Guévremont; Yves Michaud, directeur du journal « La Patrie ». Il fut présenté par le Richelieu Roger Alarie et remercié par le Richelieu Gaston Blais du poste de radio CKAC; et plusieurs autres. Au total, près de 30 conférenciers et conférencières de marque acceptèrent de partager avec les membres du club Richelieu-Lasalle, leurs connaissances et leurs expériences en 1964.

Chaque dîner était marqué par la période des amendes. Les faits et gestes des membres durant la semaine étaient rapportés au président par leurs amis, et je devais trouver moyen de les transformer en amendes. Elles furent très payantes et c’est probablement la période de chaque dîner que les membres préféraient et attendaient le plus car c’était le temps de s’amuser au dépends des autres, toujours bien amicalement.

Trois conférenciers particuliers

Certains conférenciers furent particulièrement surprenants pour les membres, qui ne les oublièrent jamais. Voici le récit de trois d’entre eux:

Le premier, alors que j’étais président, fut le conférencier l’abbé Guy Charette, prêtre auxiliaire et secrétaire de Monseigneur Cabana, évêque de Sherbrooke. Ce petit homme de soutane (avec moustache) arriva en saluant les membres bien timidement. Durant tout le dîner, surtout à la période des amendes où les propos des membres ne sont pas toujours nécessairement « catholiques », il baissa la tête sans rire devant des affirmations que les membres voulaient drôles, touchant les femmes, le sexe, l’alcool etc… Les membres remarquaient son comportement et certains en profitèrent pour exagérer leurs commentaires, faisant ainsi rougir encore plus les oreilles de l’abbé et assombrir davantage son air déjà contrit. Tous attendaient sa conférence et lorsqu’il se leva, il alla directement au point. Il blâma les membres de ne pas être de bons catholiques, de prendre de la boisson, d’insulter les femmes, de ne parler que de sexe, de ne pas respecter l’Église en « sacrant », etc… Certains membres s’offusquèrent, mais plus ils le faisaient, plus l’abbé en mettait et devenait ignoblement sévère. Une révolte montait dans la salle. Plusieurs criaient des remarques désobligeantes envers l’abbé. Ils ne pouvaient pas croire qu’un abbé pouvait être aussi mesquin et petit. Certains l’insultèrent presque. Au moment, où l’explosion allait éclater, je m’emparai du micro et je présentai Guy Charette qui était en réalité un comptable agréé, associé au grand bureau Courtois et Fredette de Montréal. Les membres n’en revenaient simplement pas. Ils s’étaient fait avoir. Et le rire s’empara de chacun, Ils se levèrent tous pour donner un « standing ovation » à Charette qui avait joué admirablement bien son rôle de faux-moine. On en parla longtemps.

Le second, en 1970, lors de la présidence de Kevin Downs, fut le conférencier Yvon Lacroix, éditeur du journal « Vers demain » des « bérets blancs » de l’ordre « Les Pèlerins de saint Michel » fondé par Louis Even et Mme Gilberte-Côté Mercier de Rougemont. Le but de ces derniers est de promouvoir « le développement d’un monde meilleur, une société plus chrétienne, par la diffusion et l’application de l’enseignement de l’Église catholique romaine, et cela dans tous les domaines de la vie en société, spécialement en économique ». Depuis quelques années, les bérets blancs s’impliquaient en politique et étaient très actifs. En 1956, le chef du parti libéral, Georges-Émile Lapalme, leur proposa une association pour l’élection provinciale. Depuis, Gilberte-Côté Mercier s’impliquait à tous les niveaux de la politique et avait adopté les théories du parti crédit social de Réal Caouette. Yvon Lacroix arriva au dîner avec son épouse. Les deux portaient leur béret blanc et transportaient des copies de leur journal pour chaque membre. Ils ne souriaient pas et semblaient engagés dans une mission importante. Son épouse, sans maquillage, avait deux longues tresses de cheveux qui descendaient vers l’avant au dessus de chacune de ses épaules. Elle était blême, sans sourire, avec un air illuminé. Comme on disait dans ce temps-là, de vrais « sainte nitouche ». Durant le dîner, ils riaient un peu devant les élucubrations de certains membres. Puis vint la conférence. Lacroix aborda le sujet de la politique et de la religion. Il raconta comment Louis Even et Gilberte Côté étaient en réalité des saints sur terre. Il démontra avoir une foi aveugle, fanatique et utopiste. Il dénonça vertement les membres du club comme étant de mauvais catholiques, dénonça ceux qui étaient actifs en politique pour le parti libéral et l’union nationale, s’amusa à salir les chefs de ces partis et à torpiller de façon démagogique leurs politiques. Au début, les membre ne réagissaient pas, sauf qu’ils trouvaient la conférence « platte » puisque Lacroix parlait sur un ton bas, monocorde, en lisant mal ses textes. Sa femme ne bronchait pas et semblait complètement soumise. Lacroix accepta un période de questions et c’est là que plusieurs membres se sont déchaînés aux applaudissements des autres. Dans ses réponses, Lacroix devenait insultant, méprisant pour les membres les accusant de rien connaître, d’être des hommes d’affaires ignorants de l’économie, etc… Des membres se choquèrent, Lacroix se choqua et fit mine de partir. Les membres l’encouragèrent à quitter. J’entendais des « chous » et plusieurs membres me regardaient en voulant me blâmer d’avoir inviter un tel énergumène à venir leur adresser la parole et leur faire perdre leur temps. C’est là que le président pris le micro, pour présenter Yvon Lacroix, qui enleva son béret blanc. Sa femme fit de même et trouva tout à coup une large sourire. Lacroix était, en fait, le secrétaire général de l’Association progressiste-conservatrice fédérale du Québec, dont j’étais le président et il avait accepté mon invitation pour venir jouer ce tour aux membres du club. Les copies du journal « Vers demain » provenaient de mon barbier qui était un « béret blanc » et qui les offrait pour lecture à ses clients en attente. Ce fut une autre conférence qui demeura longtemps dans la mémoire des membres.

Le troisième fut invité lors de la présidence de Gilles Beauchamp en 1971. Gilles m’appela pour me souligner que l’on célébrait l’anniversaire du Richelieu Henri Lemieux, un des fondateurs du club, longtemps commissaire d’école et toujours actif dans le club. Il me demanda de lui suggérer un idée pour bien marquer l’anniversaire de ce vieux membre. Je fouillai dans les journaux pour trouver une inspiration lorsque mon regard s’arrêta sur une effeuilleuse « Lola« , très populaire et qui offrait son spectacle à Montréal. Ce qu’elle avait de particulier, c’est qu’elle prenait son bain dans un grand verre de champagne. J’appelai un imprésario et lui demanda s’il était possible de retenir ses services pour devenir conférencière. Il n’en avait aucune idée mais me donna son numéro de téléphone, Je communiquai avec elle. Après mes explications, elle accepta à condition qu’on vienne la prendre chez elle et la ramener après le dîner. Le jour venu, je me rendis la prendre et lorsqu’elle apparut dans la porte de son bungalow, elle avait un air non seulement exotique mais très intelligent. Les membres du club avaient été avisés que le conférencier-invité serait une surprise. Lorsqu’elle arriva avec moi, tous les yeux se retournèrent vers elle. Elle s’avéra être une conférencière très intéressante et nous raconta sa vie, et comment elle en était arrivée à être une effeuilleuse. À la surprise de tous, son approche était très professionnelle. C’était une fille bien éduquée, qui s’exprimait très bien. Elle était habillée d’un ensemble jupe et veston léger, très ouvert en avant. De toute évidence, elle ne portait pas de brassière. Vers le milieu de sa conférence, elle se mit à danser en chantant, quitta le podium et passant près de moi, me demanda si elle pouvait détacher sa veste. Je lui dit NON. Elle se dirigea vers le Richelieu Henri pour lui souhaiter un bon anniversaire. Elle se pencha exagérément sur sa tête et l’entoura de ses longs bras. On perdait presque Henri de vue… Il en ressorti avec un sourire comme jamais on en avait vu un sur sa face. Tous les membres accompagnaient la musique et encourageaient Lola à continuer, à aller plus loin. Mais, elle avait compris qu’il y avait une limite qu’elle ne devait pas franchir et revint au micro pour terminer sa conférence. Après son exposé, tous s’approchèrent d’elle pour la féliciter et un membres demanda où était son prochain spectacle. Il organisa sur-le-champ une visite pour aller la voir faire son numéro. Plusieurs y participèrent. Henri n’oublia sûrement jamais ce diner Richelieu.

Congrès

Il y eut aussi le congrès du club Richelieu International à Cannes en France, le congrès national à Niagara Falls. À chaque fois, notre délégation se montra à la hauteur de la situation et ensemble nous avons eu un plaisir fou à participer à ces rencontres et appris à connaître nos amis d’autres clubs. À Cannes, le président du club cannois nous convia à un dîner régulier de son club et m’invita à présider la période des amendes. Comme les dollars ne disaient rien aux Français, c’est en milliers de « balles » que les montants des amendes furent fixés. Ce qui en a fit rire plus d’un.

La campagne de cigares

Le club décida de vendre des cigares pour collecter des fonds. La structure d’organisation de la campagne faisait en sorte que tous les membres du club étaient membres d’une équipe et chacun avait son objectif de vente. La campagne fut lancée en grandes pompes en présence de la presse et Jean Béliveau, joueur de centre du club d’hockey Canadien en compagnie du père Noël.

L’objectif fut rencontré grâce, en particulier, à l’idée de Gilles Beauchamp de demander aux curés des paroisses de Ville Lasalle d’accepter qu’un membre du club Richelieu-Lasalle puisse monter en chaire pour donner aux paroissiens un genre de sermon sur la charité, la campagne et ses objectifs. Tous acceptèrent et cela se traduisit par un franc succès. J’eus le bonheur de parler dans deux églises. Soit celle de la paroisse Sacré-Cœur et la mienne de Saint-Télesphore.

Tous les argents perçus lors des dîners hebdomadaires du club s’ajoutèrent au profit de la campagne de cigares, ce qui permit aux responsables des oeuvres de charité du club Richelieu-Lasalle de bien faire leur travail et d’aider encore plus de jeunes infortunés comme au camp De La Salle sous la responsabilité du Richelieu Couture et du Richelieu Kaltenbach.

Le défilé de mode

En mars 1964, le club décide d’organiser un défilé de mode pour répondre à une demande d’aide financière de l’hôpital général de Lasalle qui a un besoin urgent pour améliorer ses services afin de mieux répondre à la croissance rapide de la population de Lasalle.

Mon épouse Manon accepte d’organiser l’évènement. Elle approche la députée du comté Mme Claire Kirkland Casgrain et l’épouse du maire de Lasalle Mme Dora-David Boyer pour qu’elles patronnent le défilé avec elle. Plusieurs épouses de membres du club, dont Gaétane Beauchamp acceptent son invitation de se joindre à son comité. De plus, le Richelieu Gaston Blais agira comme maître de cérémonie.

La grande salle Windsor de l’hôtel Windsor de Montréal est réservée.

La vedette de télévision Janette Bertrand est la commentatrice etle très populaire duo de comédiens-chanteurs «Les Jérolas», composé des artistes vedettes de l’heure Jean Lapointe et Jérôme Lemay, y donnent leur numéro.

Lily Simon y présente ses créations printemps-été, D’Ora lingerie ses vêtements sports et sa lingerie et le Richelieu Gilles Beauchamp, qui est tailleur, présente ses créations de costumes et de manteaux pour dames.

L’évènement est un grand succès puisque plus de 600 personnes y participent. Le club Richelieu-Lasalle a pu ainsi verser quelques milliers de dollars à la direction de l’hôpital pour l’achat d’équipements nouveaux.

Les campagnes de recrutement

Il y eu deux campagnes de recrutement de nouveaux membres. Les échos qui venaient par le « Messager de Lasalle » et par la bouche des membres attiraient de plus en plus de jeunes hommes à devenir membre du club. À la première campagne, huit nouveaux membres furent intronisés: le notaire Georges Garneau, Marcel Ducas, Gaston Laniel, Louis Beaudoin, Serge St-Onge, Noël Séguin, le docteur Vigeant et le musicien Noël Talarico. Une autre groupe de cinq nouveaux membres dont Kevin Downs s’ajouta lors de la seconde campagne. Au total, le club approchait les 100 membres.

Les passeports de l’Expo

Durant mon mandat de président, je reçois un appel du maire de Montréal, Me Jean Drapeau, qui m’invite à le rencontrer à l’hôtel de ville à son bureau à 8h00. J’avais eu l’occasion de le connaître à l’université de Montréal alors que j’étais vice-président de l’AGEUM et que notre conseil étudiant avait décidé d’appuyer sa candidature à la mairie de Montréal. J’avais aussi travaillé comme volontaire lors de sa première campagne électorale. De plus, lors de mon passage à la Chambre de commerce des Jeunes du district de Montréal, j’avais eu l’occasion plusieurs fois de le rencontrer alors qu’il venait nous encourager par sa présence et son discours, lors de nos campagnes de recrutement et autres activités jeune commerce.

  1. Drapeau me demande si les clubs Richelieu accepteraient de s’occuper d’une partie de la vente des passeports pour expo67. Le passeport était le droit d’entrée sur les terrains de l’expo pour toute la durée de l’exposition et avait la forme d’un vrai passeport de pays. De plus, à chaque pavillon, les passeports pouvaient être estampillés du symbole du pays.

La demande du maire me surprend. Après discussion, je lui suggère d’inclure tous les clubs sociaux dans le projet puisqu’un passeport va intéresser chacun des individus qui vivent dans la grande région métropolitaine. Il acquiesce à cette suggestion et me demande de convoquer une rencontre avec les présidents de chacun des clubs sociaux montréalais : Rotary, Lions, B’nai Brith, Optimist, Kinsmen, Kiwanis, Richelieu ….

L’exécutif du Club Richelieu-Lasalle accepte et me délègue pour contacter le président du Club Richelieu de Montréal. Celui-ci est aussi enthousiaste et choisit un membre de son exécutif, Léo Davignon, pour s’en occuper. Avec ce dernier, nous faisons une recherche pour trouver des porte-paroles pour les autres clubs. Nous convoquons leurs représentants à l’hôtel Windsor pour une rencontre avec le maire Drapeau. Nous sommes quelques centaines. Tous sont enthousiastes à l’idée car ils ambitionnent de faire quelque chose pour contribuer à la réussite de l’Expo67. De plus, ils sont heureux car cela leur permettra de collecter des fonds additionnels pour leurs œuvres charitables.

Un nouveau groupe fut créé : l’ « Inter-clubs-sociaux ». Le comité était composé de Léo Davignon, de Julius Briskin du B’nai Brith, W. Emerson, Gérald Rose, E. Harrison Reed Barnes, Donald Brown, W. Pugh, W. Clark, et Claude Dupras. Le délégué du Richelieu-Montréal, Léo Davignon, devint le président et je fus un des vice-présidents. Finalement, le comité avec l’accord d’expo67 se donna le mandat de mettre sur pied un projet pour la commémoration du centenaire du Canada.

La Ronde

Une exposition n’a pas nécessairement un parc d’amusement avec manèges. Le maire Drapeau voulait doter Montréal d’un tel équipement qui manquait dans sa ville depuis la fermeture du Parc Belmont. Il estimait que le pouvoir d’attraction d’un tel parc pouvait motiver plusieurs touristes étrangers à venir dans sa ville. Le Comité organisateur de l’Expo accepta et le situa sur la partie Est de l’île Ste-Hélène. Cependant, le gouvernement fédéral, par son ministre du commerce, qui finançait en grande partie la construction de l’Expo, s’objecta à cette proposition car, disait-il, le parc tomberait après l’expo dans les mains d’entrepreneurs privés et le gouvernement fédéral n’était pas là pour financer de telles propositions.

Le maire Drapeau avait une vision différente. Tout comme le ministre , il ne voulait pas voir les profits d’une telle activité tomber si facilement dans les mains d’hommes d’affaires et comme la ville ne pouvait ajouter un tel équipement à son réseau de parcs municipaux, il chercha une autre alternative. Il pensa aux clubs sociaux de Montréal. En effet, il imagina que ces derniers pourraient se réunir pour former une corporation sans but lucratif, qui deviendrait propriétaire de la Ronde et dont les profits seraient versés à leurs œuvres charitables. Encore une fois, il m’invita à son bureau, toujours tôt le matin, pour m’en parler. Je sautai évidemment sur l’idée et à nouveau l’exécutif du Club Richelieu-Lasalle donna son accord.

Après consultations auprès de présidents d’autres clubs, j’annoncé au maire que nous étions enthousiasmés par son plan. Il me demanda de nous préparer à faire une proposition précise à l’organisation de l’Expo67. Nous nous réunîmes plusieurs fois pour la préparation d’une étude sur la rentabilité du projet, consultâmes des experts-comptables, analysâmes l’organisation de centres similaires aux USA et après 7-8 semaines étions prêts à rencontrer Expo67 pour discuter sérieusement de la proposition. Au même moment, je reçus un nouvel appel du maire pour une rencontre urgente à son bureau. Il m’avisa qu’il avait acquis la conviction qu’il n’était pas possible de transférer « le projet de la Ronde » aux clubs sociaux puisqu’ils n’avaient pas les reins financiers suffisamment forts pour assurer qu’une telle entreprise devienne une réussite permanente. Seul, disait-il, le B’nai Brith pourrait probablement le faire mais comme il voulait regrouper tous les clubs et non en favoriser qu’un, il changea d’idée.

Le nouveau président Pierre Maynard

En fin de mandat, Pierre Maynard fut choisi le 5ième président du club Richelieu-Lasalle et il intronisé avec les nouveaux officiers du club pour le mandat 1965 lors d’une grande fête à laquelle participaient près de deux cent personnes.

Depuis, les années ont passé et aujourd’hui en 2012, le club Richelieu-Lasalle fête ses 50 ans d’existence. Durant tout ce temps il a continué à permettre à ses membres de fraterniser et ensemble d’aider les plus défavorisés. Il a entrepris aussi des campagnes pour la promotion de la langue française.

Parmi les 46 présidents depuis la fondation du club (certains ont eu des mandats de deux ans), 14 étaient membres en 1964.

2012

Le président du Club Richelieu-Lasalle en 2012 est le Richelieu Daniel Thériault. Il a été président en 2011 et complète son mandat de deux ans.

 

2 Commentaires

  • Claude Senécal

    18 juin 2023 at 04:11 Répondre

    Wow, un bel article qui m’a rappelé plusieurs bons souvenirs. J’ai grandi dans la création ce club. Les soupers pères/fils et la participation à la soirée d’initiation des nouveaux membres, la rencontre avec le grand Jean Béliveau et bien sûr « LOLA » très excitant pour un ti-cul de 8 ou 9 ans. Finalement le souvenirs des amis de mon paternel, les Ménard, Lebuis, Poirier, Vezina et j’en passe. Merci Monsieur Duparas pour cet tranché d’histoire.

  • R/Pierre Morin - Club Richelieu Cornwall

    18 novembre 2023 at 13:45 Répondre

    Exister-t-il un livre qui renferme précieusement cette histoire ?

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