Shanghai, la "perle de l’Orient"


Shanghai, la «perle de l’Orient»

À l’origine port modeste et village de tisserands, Shanghai ne semblait pas promise à devenir le grand Shanghai moderne d’aujourd’hui.

Du village de Hua Ting vers les années 600, elle est devenue la préfecture de Huating avant de prendre son nom Shanghai sous la dynastie Song (960-1234).

Donnant sur la mer, et située stratégiquement à l’embouchure du Yangzi Jiang, au centre de la Chine, et près des villes aux productions artisanales réputées (Suzhou, Hangzhou), Shanghai est devenue très tôt un centre d’échanges économiques importants.

Les Britanniques

Ce n’est qu’après les guerres de l’opium et avec la présence étrangère que le développement économique de la ville a pris l’envergure qui a fait sa réputation. Pendant la première guerre de l’opium, les forces britanniques ont temporairement tenu la ville. Américains et Français suivront, précédant les Russes et les Japonais. La guerre a cessé en 1842 avec le traité de Nankin, établissant l’ouverture commerciale des ports chinois, dont Shanghai. Les Britanniques vainqueurs y ont aménagé l’un des cinq ports ouverts qui leur seront alors concédés. Avec le traité du Bogue, en 1843 et le traité sino-américain de Wangxia, en 1844, des nations étrangères ont eu le droit de s’établir sur le territoire chinois : ce fut le début des concessions étrangères.

Les Français

La petite enclave française de Shanghai s’est établie sur une zone marécageuse en 1849. Elle fut à la fois un havre pour les réfugiés de toutes les nationalités et un lieu de culture et de plaisirs.

Avec la révolte des Taiping en 1850, Shanghai fut occupée par une triade, associée au mouvement appelé Société des Petites Épées. La guerre faisant rage dans les campagnes, de nombreux Chinois se réfugièrent dans la ville qui leur était théoriquement inaccessible : en 1854, de nouvelles lois permirent aux Chinois d’y acquérir des terrains, provoquant une inflation immobilière. Cette année-là eut également lieu la première réunion du conseil municipal de Shanghai, afin de gérer les concessions étrangères établies de facto. En 1863, les colonies américaines et britanniques se rejoignirent pour former la Concession internationale, alors que les Français établirent, eux, la Concession française.

Le bordel du monde

En mars 1854, l’empire chinois a signé un accord avec les Européens présents dans les concessions leur demandant de construire rapidement de nombreux logements, une grande partie de la ville ayant été détruite par une révolte. C’est ainsi que se construiront les lilongs, jusqu’en 1949.

Jeu, opium et prostitution sont alors les activités les plus lucratives de cette ville baptisée à cette occasion « le plus grand bordel du monde ». Son parrain le plus connu, Du Yuesheng, menait ses trafics en collaborant étroitement avec la police de la concession française.

Les Japonais

Après la guerre sino-japonaise de 1894-1895, le traité de Shimonoseki a permis aux Japonais de s’ajouter aux forces occupantes. Ils établirent à Shanghai les premières usines de la ville.

Cette période d’occupation a profondément marqué l’identité culturelle de la ville, tout en contribuant dans les années 1920 et 1930 à l’essor des arts, cinéma, théâtre, et la naissance du premier groupe de jazz chinois. En 1920, on y recensait un million d’habitants, dont 26,800 étrangers de nationalités diverses. Ils façonnèrent les rues à leur goût, mêlant les styles néogothique, classique, victorien, Art déco… La chanteuse et actrice Zhou Xuan était sans doute la figure la plus emblématique de cette période.

Le parti communiste chinois

C’est aussi à Shanghai que fut créé le Parti communiste chinois en 1921 et qu’ont été organisées les premières grèves ouvrières. La plupart des coolies et des ouvriers qui demeuraient dans la pauvreté vinrent grossir les rangs du Parti communiste chinois. En 1927, dans le cadre de l’expédition du nord de pacification de la Chine, les ouvriers chinois, mobilisés par les communistes, prirent Shanghai aux seigneurs de la guerre avant même l’arrivée des troupes gouvernementales. Tchang Kaï-chek, inquiet de la mobilisation réussie par les communistes, décida de se retourner contre ses alliés et lança les triades contre les ouvriers, déclenchant le massacre de Shanghai, qui signa le début de la guerre civile chinoise.

La guerre civile

Sous le régime de la République de Chine, Shanghai devint une ville spéciale en 1927, et une municipalité en mai 1930. Elle fut alors le centre financier de l’Asie, où les dollars mexicains par exemple s’échangeaient en masse après la crise boursière de 1929. La marine japonaise bombarda la ville le 28 janvier 1932, officiellement pour réprimer les protestations étudiantes ayant suivi l’incident de Mandchourie, déclenchant la « guerre de Shanghai ».

À compter du mois d’août 1937, à l’aube de la seconde guerre sino-japonaise, Shanghai fut soumise par la marine et l’armée nippones à une série de bombardements qui entraînèrent la mort et l’évacuation de plusieurs milliers de civils. Disposant de forces terrestres et navales bien supérieures à l’armée chinoise, les troupes impériales prirent possession de la ville en novembre (bataille de Shanghai), puis se dirigèrent vers Nankin où elles se livrèrent à un terrible carnage (massacre de Nankin).

En 1938, Shanghai était devenue le cinquième port mondial; les plus grandes firmes occidentales y étaient désormais représentées.

La guerre mondiale

Durant la Seconde Guerre mondiale, Shanghai devint temporairement un centre pour les réfugiés d’Europe : c’était alors la seule ville ouverte inconditionnellement aux Juifs. En 1941, sous pression de leurs alliés nazis, les Japonais reçurent les réfugiés juifs dans un ghetto, où les maladies pullulaient. L’immigration juive fut finalement stoppée par les Japonais le 21 août 1941.

Les Japonais prirent le contrôle total des concessions le 8 décembre 1941. Durant l’occupation japonaise, les citoyens des pays alliés travaillant pour l’administration municipale demeurèrent à leur poste jusqu’en février 1943, date à laquelle ils furent internés.

En février 1943, le gouvernement du Royaume-Uni signa avec la République de Chine un traité acceptant le principe d’une rétrocession. En juillet de la même année, les Japonais rétrocédèrent le conseil municipal au gouvernement collaborateur chinois de Wang Jingwei. Après la guerre, une commission de liquidation fut mise en place pour gérer la rétrocession à la République de Chine.

Mao Tsé-Toung et Deng Xiaoping

Les huit années d’occupation, puis la victoire, en 1949, de Mao Zedong (Tsé-Toung) sur les troupes du général Tchang Kaï-chek précipitèrent le déclin de la ville.

Pendant la Révolution culturelle, Shanghai connut des troubles politiques et sociaux : à la fin décembre 1966, la municipalité fut renversée. Les plus importantes grèves de l’histoire de la ville paralysèrent la vie économique. Les rebelles et les gardes rouges désiraient mettre en place un système semblable à la Commune de Paris. Le bilan de la Révolution culturelle pour la ville fut considérable : 150 000 logements furent confisqués. Entre 1968 et 1976, un million de Shanghaiens furent ruralisés de force.

Après la victoire des communistes, la ville a été considérée comme le symbole du capitalisme étranger, elle sommeillait, et le monde l’avait presque oubliée, avant d’être revalorisée suite au mouvement de réforme de Deng Xiaoping.

Autrefois tête de pont des puissances coloniales dans une Chine agonisante, Shanghai est devenue le premier centre industriel du pays, en même temps que l’une des plus grandes métropoles du monde.

La renaissance

Au début des années 1990, en une décennie, la « perle de l’Orient » est redevenue un centre économique de première importance, qui comptait en 2005 pour 20 % de la production industrielle nationale pour seulement 1,5 % de la population. Elle se destine aujourd’hui à devenir le centre financier de la Chine, grâce au quartier de Lujiazui.

Le 3 décembre 2002, la métropole chinoise a été désignée pour organiser l’Exposition universelle de 2010, qui se tient donc, pour la première fois depuis 151 ans, dans un pays en voie de développement.

La population de Shanghai est de plus de 20 millions d’habitants. Shanghai est la troisième plus grande municipalité de la République populaire de Chine (RPC), après Chongqing et Pékin. En RPC, une municipalité est une ville avec un statut équivalent aux provinces chinoises. Le recensement de 2000 positionne la population de Shanghai à 16,738 millions, dont 3,871 millions de migrants. Depuis le recensement de 1990, la population totale a augmenté de 3,396 millions d’individus, soit une croissance de 25,5%.

Selon le Bureau municipal des statistiques de Shanghai, la ville comptait 133 340 étrangers en 2007, dont de nombreux Japonais, Américains, Sud-Coréens, Singapouriens, Allemands, Français et Canadiens. On compte également un nombre important d’habitants de Taïwan qui résident à Shanghai pour les affaires (près de 500,000).

En 2006, l’espérance de vie était de 80,97 ans (78,67 pour les hommes et 82,29 pour les femmes). Le revenu moyen annuel des résidents de Shanghai, basé sur les trois premiers trimestres de 2009, est de 21 871 yuans (environ 3,000$).