L’Islande (Iceland)
Un voyage en Islande, terre des extrêmes et des contrastes, à la limite du cercle polaire, est l’occasion d’une fabuleuse leçon de géologie. Volcans, glaciers, champs de lave, zones géothermiques, plages de sable noir composent des paysages sauvages qui, selon le temps, l’éclairage et les aurores boréales évoquent le début ou la fin du monde. Sols craquelés, soulevés, fumants, bouleversés, laissant apparaître par endroits les entrailles de la terre, l’Islande était considérée autrefois comme la porte des Enfers.
Et pourtant, quelque 320 000 habitants vivent sur cette île, la deuxième d’Europe, dans de paisibles villages côtiers, fiers d’être ancrés à une île dont la découverte ne laisse jamais indifférent. Car, à l’image de son relief et de ses couleurs tranchées et crues, l’Islande ne peut inspirer que des sentiments entiers.
Il n’est pas 10 km que l’on fait sans s’émerveiller de la splendeur des paysages. En un mot, l’Islande est une destination unique pour le voyageur amoureux de nature et de solitude.
La géographie
L’Islande, « terre de glace », est un État insulaire de l’océan Atlantique Nord, situé entre le Groenland et l’Écosse, au nord-ouest des îles Féroé. Géographiquement plus proche du continent américain via le Groenland, le pays est rattaché culturellement et historiquement à l’Europe. Sa capitale, et plus grande ville, est Reykjavik. L’islandais en est la langue officielle.
C’est un pays insulaire de 102 800 km² équivalent à la superficie de Cuba, soit trois fois la superficie de la Belgique (30 527 km²), le cinquième de la France (544 000 km²) ou le quart de la province de Terre-Neuve (402 000 km²) au Canada.
L’Islande est située sur la dorsale médio-océanique entre l’Europe et l’Amérique. Ainsi, d’un point de vue de la tectonique des plaques, la partie nord-ouest de l’Islande est sur la plaque américaine et la partie sud-est est sur la plaque eurasiatique. De plus, un point chaud se situerait juste en dessous de l’Islande, plus précisément sous le massif du Vatnajökull. Cette situation unique engendre sur l’île une importante activité volcanique et géothermale dont 130 volcans actifs et nombreux phénomènes para-volcaniques tels les geysers (ce mot étant lui-même d’origine islandaise). L’abondance d’une telle énergie géothermique fait que la plupart des habitants ont accès à l’eau chaude et au chauffage domestique pour des prix très modiques.
Depuis l’ère tertiaire, cette île ne cesse de se transformer à cause de l’activité volcanique permanente.
Le volcan Eyjafjöll est entré en éruption le 15 avril 2010, provoquant l’arrêt des lignes aériennes dans le nord de l’Europe durant plusieurs jours.
L’histoire
L’île d’Islande fut d’abord découverte par les Irlandais au VIIIe siècle, mais elle fut exploitée et colonisée par les Vikings norvégiens en 874. La région de Reykjavik se peupla rapidement et les insulaires fondèrent un nouveau pays aux environs de 930, lorsque la quasi-totalité des terres arables fut colonisée. Les Islandais s’organisèrent en une société hautement originale et élaborèrent une littérature exceptionnelle, dès qu’ils eurent adopté l’écriture latine qu’amena l’Église catholique à partir de l’an 1000. L’Islande est restée célèbre pour ses sagas des Xe et XIe siècles, des récits en prose rédigés dans la langue vernaculaire de l’époque.
Puis, en 1262, l’Islande fut dirigée par les Norvégiens, mais resta relativement autonome. Les Islandais crurent qu’un roi éloigné, celui de la Norvège, était moins dangereux et qu’il leur accorderait davantage d’autonomie. Mais cette occupation norvégienne fut une période de décadence pour l’Islande jusqu’à ce que le royaume de Norvège tombât sous la souveraineté de la couronne danoise en 1937, lors de l’Union de Kalmar. Cette Union réalisait sous un seul royaume l’unification du Danemark, de la Suède et de la Norvège et prévoyait que les trois pays (dont l’Islande faisait partie) seraient gouvernés par un roi danois, Erik de Poméranie.
En 1521-23, l’Union avec la Suède prit fin, mais celle avec la Norvège dura jusqu’en 1814. Au cours de l’histoire, les calamités naturelles, comme la peste, ont plusieurs fois décimé la population. Pendant une dizaine de siècles, celle-ci n’a jamais dépassé les quelque 70 000 habitants.
En 1814, l’Union entre le Danemark et la Norvège fut abolie, et les deux États devinrent indépendants. Le statut politique de l’Islande se transforma avec le rétablissement de l’assemblée islandaise, l’Althing, mais celle-ci n’obtint qu’un contrôle partiel sur ses finances publiques. L’autonomie politique interne ne survint qu’en 1904 et elle fut même «complétée» par une loi d’Union avec le Danemark en 1918, le roi du Danemark conservant son titre de roi d’Islande.
Lors de la Seconde Guerre mondiale, le Danemark, lui-même envahi par l’armée allemande, dut laisser tomber l’Islande en 1940. Les nazis du Troisième Reich popularisèrent la littérature islandaise. Ils y voyaient un héritage de la grande culture germanique. Le problème, c’est que beaucoup de héros romantiques prétendument «germaniques» avaient leur origine dans la tradition islandaise; même Richard Wagner, dans ses célèbres drames épiques, avait puisé son inspiration dans les récits de la littérature islandaise.
Puis le pays connut l’invasion des Américains. En effet, alors qu’en 1940 l’Islande n’était peuplée que de 126 000 habitants, 50 000 soldats américains débarquèrent sur l’île afin de combattre les forces hitlériennes. Cela provoqua un exode rural en direction des villes et villages côtiers, dont une grande partie vers Reykjavik, la capitale. L’économie se développa par la suite en fonction des intérêts des États-Unis. Durant «l’occupation américaine», l’anglais remplaça le danois dans les fonctions officielles, mais les «autochtones» continuèrent de parler leur «dialecte». Après la fin de la guerre, les Américains ne quittèrent pas l’île, tel qu’entendu à leur arrivée.
Ce n’est qu’en 1994, aux termes d’un accord signé avec Washington, que seule la base de Keflavík subsiste actuellement avec 2 800 soldats américains qui assurent la défense de l’île et des missions dans le cadre de l’OTAN. Il faut préciser que l’Islande n’a pas d’armée mais seulement 200 garde-côtes qui surveillent les eaux territoriales.
Il n’existe guère de minorité dans ce pays, mais depuis quelque dix ou quinze ans des immigrants en provenance de l’Espagne, du Portugal, mais surtout des Philippines, de la Thaïlande, du Vietnam, du Sri Lanka et de l’Inde, sont venus s’y établir. Ces immigrants ne sont encore guère nombreux et ne représentent que 2 % de la population islandaise.
La langue
L’islandais est une langue germanique du Nord (de type scandinave), appelé íslenska. L’Islande apparaît comme l’un des pays les plus homogènes au monde parce que sa population parle la même langue dans une proportion de 98 %. La langue a peu évolué et est restée proche du vieil islandais parlé au Moyen Age. La majorité des Islandais maîtrise aussi parfaitement l’anglais. Concernant les patronymes, les islandais ont conservé la tradition viking, ainsi le « nom de famille » est composé du prénom du père suivi du suffixe –son (fils de) ou –dóttir (fille de), de ce fait les membres d’une même famille peuvent avoir un « nom de famille » différent.
La langue islandaise reste très particulière à plus d’un titre. Il s’agit d’une langue scandinave comme le danois, le norvégien, le suédois et le féroïen, mais si ces trois «langues continentales» demeurent mutuellement intelligibles, il n’en est pas ainsi pour l’islandais. Aucun locuteur de ces trois langues ne comprend ni ne lit l’islandais, alors qu’un Islandais, à la condition de bénéficier d’un peu d’instruction et de culture, comprend et lit toutes les autres langues scandinaves, y compris le féroïen parlé aux îles Féroé.
L’école primaire ne fut obligatoire qu’en 1913. Jusqu’à cette époque, il n’y eut jamais d’écoles où l’on enseignait en islandais, bien que tous les enfants savaient lire et écrire en cette langue. Seul le danois était enseigné, l’islandais étant réservé à la maison. Ce sont les parents qui apprenaient à leurs enfants à lire et à écrire en islandais.
Aujourd’hui, de la maternelle à l’université, le système scolaire est gratuit. Dans les écoles primaires et secondaires et aux trois universités, la langue d’enseignement est l’islandais, mais le danois et l’anglais sont obligatoires comme langues secondes. De plus, à la fin du secondaire, un examen de connaissance de la langue officielle est imposé à tous les élèves et constitue une condition essentielle à l’obtention du diplôme de fin d’études. Le ministère de l’Éducation impose une troisième langue étrangère aux élèves du secondaire, À la fin de leurs études secondaires, la plupart des Islandais sont devenus trilingues: ils parlent l’islandais, l’anglais et le danois. Des crédits sont accordés pour l’instruction spéciale des immigrés.
Du côté de la législature, les débats ne se déroulent qu’en islandais et les lois ne sont rédigées que dans cette langue. Dans les tribunaux, seul l’islandais est autorisé, mais les étrangers et les immigrants peuvent recourir à un interprète en cas de force majeure.
L’islandais est réputé pour être une langue difficile, avec une grande richesse de vocabulaire (peu influencé par les emprunts étrangers) avec ses abondants néologismes locaux, une grammaire assez complexe (trois genres grammaticaux et quatre déclinaisons), un alphabet latin doté de lettres supplémentaires, une prononciation particulière par rapport aux langues scandinaves, etc. En somme, l’islandais contemporain est demeuré plus proche de l’ancien nordique parlé par les premiers Vikings (avant l’an 1000) que les autres langues scandinaves. En ce sens, cette langue constitue un véritable «musée linguistique vivant» pour les linguistes.
Les journaux, largement subventionnés par l’État, doivent se plier aux contraintes de la politique de l’islandisation du vocabulaire. Ainsi, tous les quotidiens diffusent des bulletins d’information linguistique ainsi que la liste des termes techniques récemment créés par la Commission de la langue islandaise. De plus, la loi oblige les employés, notamment les journalistes et les présentateurs de nouvelles de la radio et de la télévision « de promouvoir l’essor culturel en général et de renforcer la langue islandaise »
Le plus surprenant, c’est que le pays a produit plusieurs écrivains de renom, dont le grand Halldór Laxness, qui remporta le prix Nobel de la littérature en 1955. Laxness modifia l’orthographe, recourut à des mots familiers, inventa des termes nouveaux et utilisa même des mots étrangers. Il écrivit plus d’une quarantaine d’oeuvres (recueil de nouvelles et de poèmes, romans, pièces de théâtre, etc.) et fut traduit en une trentaine de langues. De nombreux contes et légendes mettant en scène des histoires de revenants, d’elfes et de trolls font également partie intégrante de la culture islandaise.
Il est remarquable que la petite langue islandaise ait toujours réussi à se protéger de l’influence américaine, ce qui n’est guère le cas des langues comme le norvégien, le suédois ou le danois. Ce n’est pas pour rien que tous les films étrangers doivent être sous-titrés en islandais.
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