le 23 avril 2002


Ce dialogue traite des politiques du président Bush junior, de l’élection présidentielle en France et des effets de la CIA dans le monde.

23 avril 2002

Mansour: Ton dernier message ne fait que confirmer mes appréhensions à moyen et long terme de la situation des USA à travers tout le Moyen-Orient et même le reste du monde musulman (qui représente au moins le quart de l’humanité aujourd’hui et sa part ne fait qu’augmenter d’un an à l’autre). Pas plus tard qu’hier soir, j’ai vu un document américain relatif à ce mouvement asiatique panislamique qui n’espère que créer une nation musulmane incorporant l’Indonésie, la Malaisie et un grand nombre de sous – régions de cette région (y compris une partie des Philippines). Et cette soi-disant nation musulmane d’Asie aura pour principal objectif de s’opposer aux USA.

Claude: Je ne crois pas que cela arrivera. Ces pays sont trop grands et la population de chacun est généralement homogène. Et ce n’est pas parce que la religion musulmane est présente qu’ils se décomposeront en morceaux. Il y a partout des séparatistes. Déjà l’Indonésie compte plus de 250 millions de personnes. Ce pourrait être une force mondiale avec une telle population. Ce n’est pas une même religion qui fera du nouveau pays du sud-est asiatique dont tu parles une force mondiale. C’est l’économie. J’entends comme toi des bruits mais je ne vois rien venir de ce coin là du monde que j’ai visité deux fois et où j’ai été très marqué par la vie paisible des habitants de ces régions.

Mansour: J’ai aussi vu une émission spéciale «génocide» à la chaîne télévisée PBS dans laquelle on démontrait que tous les génocides perpétrés pendant la soi-disant guerre froide, aussi bien en Amérique latine et Amérique centrale qu’en Afrique avaient les empreintes de la CIA. L’histoire couvrait la mort de centaines de milliers de Chiliens, Guatémaltèques, Péruviens, El Salvadoriens. Elle parlait aussi des assassinats de personnages politiques comme Hammarskjöld et Lumumba. Sans oublier aussi les massacres perpétrés contre le peuple vietnamien pendant plus d’une décennie au nom de la démocratie.

Claude: Je t’ai déjà donné mon point de vue sur ce sujet en t’expliquant que la montée du communisme dans toutes ces régions a été arrêtée par l’intervention des USA. Certes ce fut choquant de voir des présidents élus, comme Allende et Lumumba, se faire assassiner et apprendre que la CIA était à la base de ces gestes honteux. C’est probable, mais malheureusement ce n’est pas encore prouvé. Il faut se rappeler que les généraux du coup d’état du Chili étaient des hommes durs qui ont fait plusieurs massacres depuis et, là tout comme en Argentine, on retrouve encore aujourd’hui, et à chaque jour, des milliers de mères qui manifestent sur la place publique avec la photo de leur mari ou de leur fils disparus. Pour plusieurs latinos, surtout les militaires, la vie humaine ne vaut pas cher. Heureusement, aujourd’hui, la démocratie s’est implantée et l’événement Chavez a démontré, pour la première fois, que si les gouvernements de ces pays de l’Amérique du Sud prennent leur responsabilité face à un coup d’état, même s’il est prétendument monté par la CIA, ils peuvent faire la différence. Aux USA, il y a eu la mort de Malcolm X et de celle Martin Luther King qui sont aussi, dans plusieurs milieux, attribuées à la CIA. Cependant où sont les preuves, si elles existent.

Mansour: Les Américains aujourd’hui essaient de justifier leur agression imminente vis-à-vis de l’Irak au nom des armes chimiques, biologiques et nucléaires que ce pays semble avoir ou voudrait acquérir, alors que pendant des années les USA ont utilisé sans réserve morale le napalm et l’agent orange contre tout un peuple qui refusait de se plier à leurs désirs. Il y a des nations qui apprennent les leçons de leur propre histoire mais ce n’est pas le cas des USA qui demeurent toujours arrogants. Malgré les désastres du Vietnam et leurs aventures en Amérique latine, les USA n’ont rien trouvé de mieux que de retourner vers leurs stratégies des années 60-70, pour donner une leçon au gouvernement élu démocratiquement du Venezuela, la semaine dernière. Le seul pays à avoir reconnu le nouveau gouvernement fantoche créé par un «quarteron de généraux» comme aurait dit le général De Gaulle, a été celui de ti-Bush, comme tu l’appelles. Mais le monde de 2002 n’est plus celui des années 60-70, au chagrin des fascistes américains qui continuent toujours à définir la politique internationale de ce pays.

Claude: Tu sembles oublier l’effroyable 11/9. Tout vient de là. Ti-Bush n’est pas à la hauteur et tous les jours on s’en aperçoit. Un autre président à la Clinton n’aurait pas agi de même. Ti-Bush est extrême, l’a toujours été au Texas (la peine de mort), et continue à l’être sans trop savoir où il va. En Europe, il perd toute crédibilité. Si la Communauté Européenne peut se servir de cette réaction des Européens vis-à-vis ti-Bush pour se donner des politiques internationales intelligentes, moralement fortes et acceptées par ses membres, elle pourra se marquer et devenir, ce qu’elle doit devenir, un deuxième pôle de puissance dans le monde. Cela viendra contrebalancer l’influence américaine et apportera un équilibre meilleur dans la vie de beaucoup de peuples et dans la morale politique universelle.

Mansour: Il ne fait pas de doute que la nation américaine est une des plus démocratiques du monde dans le domaine de la défense des droits des citoyens, mais sa puissance militaire et économique a été un des plus grands désastres de l’humanité de tous les temps. Très souvent tu défendais la politique américaine internationale au nom de la lutte contre le communisme international, mais ce monde communiste est mort depuis des années et la politique américaine n’a pas changé en fin de compte. Il faut alors admettre que même sa politique des années 50-60-70 n’avait rien à voir avec la lutte contre le communisme mondial et la défense de la démocratie, mais plutôt le reflet d’un pays arrogant de sa puissance militaire et économique.

Claude: Je crois que tu en oublies des bouts. Les huit ans de Clinton, entre autres, ont été des années d’écoute des positions des autres et d’une collaboration internationale sans pareil. Il n’a pas imposé unilatéralement la position américaine et souventes fois, comme dans la question du projet des anti-missiles qui était opposée par les Européens, les Chinois, les Russes et tant d’autres, il a su agir à la satisfaction de ses collègues du monde. Les USA ont repris beaucoup de poil de la bête durant ces périodes. Même la situation en Palestine avec des présidents comme Carter et Clinton est venue très près d’être réglée, alors qu’aujourd’hui c’est la débandade…. A mon point de vue, tout dépend du président et de l’administration en poste. Aujourd’hui, les » hawks » sont en en charge.

Mansour: Mon seul chagrin aujourd’hui, c’est que nous n’avons plus les Jean Paul Sartre, Bertrand Russel, Oppenheimer, Simone de Beauvoir, etc… capables de porter la bannière d’une morale universelle que même les De Gaulle, les Khroutchev, ou les Kennedy du monde ne pouvaient étouffer. Nous vivons aujourd’hui dans un monde sans gouvernail moral universel.

Claude: Oui, je suis en accord avec toi que des hommes et des femmes seuls, indépendants et forts intellectuellement peuvent influencer la morale universelle. C’est triste de constater que de tels individus existent de moins en moins. Ils étaient un poids moral important dans la balance des décisions politiques et des agissements des » leaders » mondiaux. On en tenait souvent compte même s’ils n’étaient pas toujours écoutés. Par contre, ils n’avaient pas toujours raison, par exemple : j’ai toujours cru que plusieurs fois Simone de Beauvoir se montrait biaisée par son positionnement de gauche et ne pouvait reconnaître qu’un politicien de droite, même de la stature de De Gaulle, pouvait faire quelque chose de bien pour la nation. Mon opinion me vient de ses livres que j’aime à lire avidement et que je continue à faire, Je lis actuellement » la force des choses II « .

Mansour: Comme je sais que tu es aussi mordu de la politique que moi je suis persuadé que tu as dû passer toute la journée du dimanche à voir comment les élections présidentielles en France se déroulent.

Claude: Je t’avoue que j’ai suivi avec grand intérêt l’élection du premier tour. Le soir des élections a été pour moi une soirée exceptionnelle et la meilleure du genre depuis une élection provinciale en 1966 au Québec quand Daniel Johnson et son parti Union Nationale ont gagné le pouvoir de façon totalement inattendue. Ce fut pour moi intéressant, révélateur, instructif, et m’a permis de mieux comprendre la France politique et ses chefs. J’ai appris, depuis mes 3 ans en France, à comprendre les complaintes des Français moyens, leur dégoût pour leur gouvernement et les hommes politiques. Et jusqu’à un certain point, je n’ai pas été totalement surpris de constater que les candidats en poste, Chirac et Jospin, n’avaient pas reçu beaucoup de votes (si on leur enlève les mordus de partis, les purs et durs partisans, il leur reste quoi?). Il me semble que cela n’a rien à voir avec la gauche ou la droite mais avec le goût de changement des Français à cause des tracas qu’ils subissent dans leur vie quotidienne, avec leurs difficultés à faire croître leurs entreprises (les 35 heures n’ont pas aidé), la crainte pour la sécurité de leurs familles et celles de tous les jours, les quantités incroyables de tracasseries législatives pour tout ce qu’ils doivent faire, le déclin des services sociaux, etc…. Comment peut-on être réélu devant un tel bilan? Et je n’exagère pas. Mon sondage est simple, j’écoute, je questionne, je lis les journaux, je m’intéresse aux lignes ouvertes et où que j’aille le son de cloche est pareil. Alors il est temps de tout bouleverser et changer… Ce n’est pas difficile à comprendre, à mon avis. Et n’oublie pas qu’ils ont eu un premier avertissement lors des dernières élections municipales.

Mansour: Je t’avoue que j’ai l’impression que la France vient de vivre un grand tremblement de terre et que les conséquences de ce séisme ne seront pas connues de sitôt. Je n’arrive pas à croire les résultats du premier tour. Comment est-ce que les Français ont préféré voter pour un Le Pen (ancien membre actif de l’OAS, raciste jusqu’au bout des ongles et fasciste) avant un socialiste ?

Claude: Que tu aimes exagérer ! Comme d’ailleurs tout ce j’entends ici, en France, depuis dimanche est tellement exagéré. Mais l’extrême droite n’a pris que 19% des votes. Et, cela lors d’une élection où les gens sont écoeurés. Mon village, le Gard, le Vaucluse et tout le Sud-est ont voté LePen. Il a atteint ici une moyenne de plus de 25%. Depuis l’élection, j’ai parlé à quelques personnes qui ont voté LePen. Leurs arguments n’ont rien à voir avec l’extrême droite mais avec le discours actuel de LePen qui est, à mon humble point de vue, très à point, réaliste, convaincant et qui frappe le clou sur la tête. Il y a beaucoup plus de trotskistes, léninistes, bolchevistes ou communistes que de gens vraiment d’extrême droite et pourtant personne en France ne les dénonce ou ne diabolise leurs chefs les Hue, les Laguiller, les Besancenot, les Gluckstein. Ils défendent des politiques qui ont été à la base de génocides et de guerres effroyables, qui ont appauvri des peuples au nom du pouvoir au prolétariat et qui aujourd’hui continuent à se servir des icônes de ce temps maudit pour faire leurs propagandes électorales. Non, il ne faut pas exagérer et il faut traiter tout le monde sur le même pied.

Mansour: C’est la première fois depuis le début de 5ième république que le candidat socialiste ne s’est pas placé en deuxième position dans les élections présidentielles.

Claude: C’est le peuple qui a décidé. Malgré cela, certains Français font (supposément spontanément) des manifestations contre la vraie démocratie qui s’est exprimée lors de l’élection par le peuple. Tout selon la loi. Eh! bien moi je n’embarque pas dans leurs parades et manifestations. Ce sont des cons… car ils n’ont pas été capables de convaincre les électeurs de les appuyer, ils ont mal gouverné, ils sont malhonnêtes et les » affaires » sont nombreuses, ils voulaient tous une partie de l’assiette au beurre et ont divisé le vote de gauche et celui de droite, ils ne sont pas capables de faire de compromis sauf pour obtenir quelque chose en retour (ministres communistes), etc… La gente politique n’a pas agi dans le meilleur intérêt de la France. Il me semble que cela est clair et aujourd’hui ils se plaignent tous, avec des trémolos dans la voix, du lait renversé. C’est très impressionnant……

Mansour: Dans 15 jours, la France aura à choisir entre la droite de Chirac et l’extrême droite de Le Pen. Quel choix !! Je me demande si au deuxième tour des élections les soi-disant gens de la gauche française se mobiliseront pour au moins barrer la route à Le Pen et si Chirac pourra mobiliser ses troupes pour se défendre contre cette marée montante de l’extrême droite partout en Europe. Dans 15 jours nous aurons certainement la réponse à cette question.

Claude: Pourquoi toutes ces questions? Le choix est clair et facile. C’est Chirac. Le Pen n’a aucune chance. Cessons de nous énerver. J’espère au moins qu’ils le traiteront comme un candidat qui a gagné de se rendre au deuxième tour et qu’au lieu de n’employer que des mots et des qualificatifs pour le salir et le diaboliser, tels, fasciste, xénophobe, etc… que l’on réfute ses arguments. Que Chirac le débatte à la télé et démontre clairement que ses visions sont erronées et dépassées. Qu’il le mette une fois pour toute à sa place. Et si Le Pen affirme qu’il est républicain, qu’il n’est pas fasciste, qu’il a un programme, pourquoi ne pas accepter cela? On a bien cru Jospin qui a dit qu’il n’était plus trotskiste mais socialiste. Les arguments pour voter contre ne doivent pas se situer à ce bas niveau mais plutôt à celui de débats sur les propositions politiques de son programme, tels, le retrait de la France de la CE, le retour au franc, sa politique d’immigration, etc…. Mais aussi, en plus et surtout, Chirac et les autres politiciens devront dire ce qui va changer. Car en réalité, ce choc, ce séisme, ce coup de tonnerre, ce tremblement de terre et tous les autres qualificatifs exagérés que l’on a utilisés pour qualifier l’appui régional à Le Pen, doit déboucher sur un changement majeur de la politique française, une approche transparente, des mesures de sécurité véritables, une application des valeurs nécessaires pour une vraie démocratie, de l’intégrité et de l’honnêteté évidente, de l’unité, une facilitation de la vie quotidienne, des impôts à la mesure réelle des familles, des lois favorisant le développement des entreprises petites ou grandes, etc…. Tout ce que je souhaite c’est que le résultat de ce cri d’alarme d’un très grand nombre de français, soit une écoute réelle du gouvernement aux complaintes des citoyens et qu’un coup de barre important soit donné pour prendre le cap vers de vraies solutions des grands problèmes qui confrontent le Français moyen.

Mansour: Le pauvre Jospin il n’avait rien de son côté. Tout d’abord, il passe à la télé comme un petit instituteur de campagne et son message passe inaperçu. Ensuite, la gauche était très divisée, comme tu le sais. Je crois que Chevènement lui a fait le plus de mal dans ces élections. Il lui a volé le slogan d’une république laïque et indivisible. J’ai l’impression que les socialistes français vont une fois de plus goûter à une longue traversée du désert, comme ils l’ont fait durant la 4ième et surtout la 5ième république.

Claude: Le vrai responsable de cette débandade de la gauche est Jospin. Il a perdu l’élection. Les gens ont voté contre. Il n’a cessé de descendre dans les sondages au point que la trajectoire de Le Pen, qui était montante, a rejoint la sienne. Il a bien fait de démissionner. Il s’est grandi et pour une fois un politicien français a accepter sa responsabilité. Avant, les autres se sont toujours accrochés en comptant sur le temps et l’usure pour finalement revenir. Pour eux la politique est une carrière. Cela ne fait pas des enfants forts!

Mansour: L’extrême gauche va redorer un peu son blason mais ne risquera en aucun moment de poser de problèmes sérieux à la droite. Cela me rappelle la période de De Gaulle quand le pauvre Mitterrand s’égosillait sans grand succès contre De Gaulle. Il a fallu la disparition du général, pour qu’il soit pris au sérieux par les électeurs français. Et malgré cela il lui a pris plus de 14 ans avant de finalement déloger la droite du pouvoir exécutif et législatif. Mais est-ce que les socialistes d’aujourd’hui ont un Mitterrand capable de leur faire traverser le désert sans jamais abandonner l’espoir de reprendre le pouvoir, j’en doute personnellement. Le seul capable de le faire est pour le moment Chevènement, mais il s’est fait trop d’ennemis au sein même du parti socialiste.

Claude: A mon avis, Chevènement est trop ennuyant et n’a pas de couleurs. La politique, c’est aussi un commerce d’images et d’illusions et lui est l’anti-thèse de cela. De toute façon la France n’a pas besoin en ce moment de politiques gauchisantes. Le temps de » interdit d’interdire » des soixante-et-huitards est terminé. Ils ont fait assez de mal comme çà. Il faut des politiques réalistes, sans philosophie politique, et qui collent à la réalité. La politique des 35 heures, par exemple, n’était pas cela, et j’espère que cette loi sera assouplie et même oubliée car les Français doivent être remis au travail. Ici, dans le Gard, c’est ce qu’ils me disent et je crois que cela a du bon sens.

Mansour: Merci de m’avoir raconté ta vie, dans notre conversation précédente, et les valeurs avec lesquelles tu l’as vécue. Tu me confirmes la différence que j’ai toujours ressentie entre la vieille Europe et l’Amérique du nord. La vieille Europe a été bâtie sur un socle aristocratique alors que l’Amérique du nord a été bâtie sur la valeur du travail et de la liberté pour tous d’aller aussi loin qu’ils le désirent. Déjà durant les années 60, quand j’étais étudiant aux USA, j’avais remarqué que la majorité des étudiants autour de moi venaient de famille d’ouvriers alors que je savais qu’en France il n’y en avait que 7% qui venaient de cette classe sociale. La mobilité sociale de l’Amérique du nord n’existe nulle part ailleurs. Elle n’a même pas existé dans le monde soviétique qui prétendait défendre les droits des ouvriers. L’Algérie des années 60 et 70 avait cette mobilité, mais elle a été vite étouffée par la nouvelle classe de nouveaux riches et de généraux qui ont pris le pouvoir après la mort de Boumediene. Tu me diras qu’il avait déjà préparé le terrain pour cette nouvelle classe, mais lui, au moins, il a été vraiment pour l’égalité des chances pour tous les enfants du pays. But I shouldn’t cry about the spilled milk as we say”. Peut-être viendra le jour où tous les jeunes Algériens auront les mêmes possibilités pour façonner leurs avenirs que les jeunes Canadiens ou Américains.

Claude: Oui je le souhaite et j’ai eu de la chance de naître dans un pays comme le Canada qui m’a donné toutes les possibilités pour ma vie. J’ai aussi bien aimé Boumediene mais je crois que son erreur principale à été d’aligner l’Algérie sur les pays de l’Est et de croire à la philosophie d’un communisme-socialisme à la Soviet. Aussi, il a peut-être voulu aller trop vite en forçant l’industrialisation dans le pays à un moment où les Algériens n’étaient pas prêts pour réellement participer à toutes ces entreprises. Le vrai malheur, c’est que le successeur de Boumediene n’était pas à la hauteur et que l’armée a une importance trop grande dans les affaires politiques de l’État.

Mansour: Je ne peux pas terminer ce dialogue sans te donner mes dernières élucubrations concernant la situation au Moyen-orient. D’un côté il ne fait plus de doute que notre ti-Bush est vraiment dans la mélasse. Il ne sait plus quoi faire. Un jour il parle de son soutien indéfectible à Sharon, un autre jour il parle de la nécessité d’un dialogue avec les Palestiniens qui ont des revendications légitimes. En faisant cela, non seulement il a tout le monde politique, de tous bords, contre lui à l’intérieur de son pays mais il s’isole de plus en plus sur le plan international. On parle déjà de la nécessité de remplacer Powell au State Department pour redonner à la diplomatie américaine une crédibilité dans sa lutte tout azimut contre le terrorisme. Personnellement, je pense que les jours de Powell à la tête de la diplomatie américaine sont déjà comptés. De deux choses l’une, ou il lui reste un peu d’amour propre et il démissionne très rapidement ou il persiste à garder son poste et il sera obligé de démissionner. L’extrême droite, orchestrée par Dick Cheney, ne voulait pas de lui en premier lieu, et ce groupe a le vent en poupe à l’heure actuelle. Et le meilleur stratagème pour se débarrasser de cet individu, qui a eu l’arrogance de dire qu’il fallait éduquer les jeunes américains en ce qui concerne les protections à prendre contre le Sida, c’est de le confronter au sujet du problème israélo-palestinien. Même la majorité des démocrates (à l’exclusion probablement des noirs au congrès) ne demanderaient pas mieux que de donner une leçon à Bush.

Claude: Oui je crois que tu as raison. Powell ne peut plus être là. Je le vois aussi partir bientôt. On verra bien. Quant à Cheney, il est le parti républicain en arrière de ti-Bush. Il il semble que ce soit le parti qui ait suggéré à ti-Bush de revenir sur sa demande, suivie de la menace qu’il a faite à Sharon, de quitter sur-le-champ les territoires occupés d’Israël. Le parti argumente que cela apporte une diversion à la guerre contre les terroristes et qu’il vaut mieux pour les Américains de garder tout simple. Donc, au nom de la simplicité, on sacrifie les Palestiniens, leurs familles, femmes et enfants, aux tanks de Sharon qui continue d’agir comme un ogre et refuse même l’entrée à un représentant des Nations Unies qui a eu l’audace d’exprimer son opinion sur la condition du camp de Jénine. Et encore là, ti-Bush, toujours à la demande de Sharon, a demandé à son ambassadeur de voter contre une résolution proposée au conseil de sécurité pour une commission d’enquête sur ce qui est arrivé dans ce camp. Kofi Annan a dû prendre l’initiative d’envoyer une équipe là-bas pour établir les faits et cela a finalement été approuvé à l’unanimité par le conseil. Belle affaire! Il est clair que nous ne connaîtrons pas toute la vérité sur les horreurs que Sharon a commandées à ses soldats. J’espère que ce député européen qui veut faire une proposition à l’effet que Sharon soit traduit devant le tribunal de La Haye pour crimes de guerre réussisse à faire adopter son point. J’en doute….

A bientôt.