Mgr Laval, Frontenac, la conquête


Mgr Laval

En 1636, Québec devient une ville défensive. On y ajoute canons et une nouvelle forteresse. La ville a maintenant une garnison. L’essor de Québec ne se fera pas vraiment avant les années 1660.

François de Montmorency-Laval, né le 30 avril 1623 en France, est ordonné prêtre et nommé vicaire apostolique de la Nouvelle-France, le 8 décembre 1658. Il est sacré évêque en l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés à Paris. Il devient Monseigneur Laval. Arrivé à Québec, le 16 juin 1659, il y fonde la communauté des prêtres du Séminaire de Québecet met sur pied le Grand Séminaire de Québec. À ce moment-là, l’actuelle province de Québec porte le toponyme de Canada et constitue une région de la Nouvelle-France. Mgr Laval devient, en 1663, à titre provisoire gouverneur-général de la Nouvelle-France. En 1668, il fonde une résidence pour les futurs prêtres, le Petit Séminaire de Québec, qui deviendra en 1765, après la conquête anglaise, un collège ouvert à tous.

Frontenac

En 1673, le nouveau Gouverneur de la Nouvelle-France est le comte de Frontenac, homme turbulent et, aux dires de plusieurs, intraitable, prétentieux, vaniteux, querelleur et vantard. Sa mauvaise réputation l’a suivi en Nouvelle-France, mais il n’est pas homme à se laisser impressionner et, étant donné que la charge de Gouverneur en fait le chef de l’armée et lui donne un droit de veto sur les décisions des autres officiels, il s’arroge les pleins pouvoirs, au mépris de ceux de l’Intendant. Il se retrouve très vite en conflit avec la bourgeoisie dirigeante de la Nouvelle-France.

En 1674, le diocèse de Québec est créé et Mgr Laval devient le premier évêque du Québec et du Canada.

À la recherche de travail, les plusieurs nouveaux arrivants rencontrent le représentant de Frontenac pour travailler comme engagés. La colonie compte maintenant 4,000 habitants et se trouve en pleine effervescence. Elle vit dans un climat de grandes attentes. C’est en effet la période des nouvelles explorations vers l’Ouest. Et, nonobstant les frustrations des familles importantes de la colonie qui s’opposent à son projet expansionniste, Frontenac mandate Jolliet, Marquette et les Montréalais Cavalier de Lasalle et Daniel Greysolon Du Luth pour étendre progressivement le réseau des territoires destinés à approvisionner le commerce des fourrures. Ils explorent le Saint-Laurent jusqu’aux Grands Lacs et, en 1682, LaSalle s’engage dans le Mississipi jusqu’au Golf du Mexique. Frontenac fait construire des forts français plus à l’Ouest dans le but d’établir des bonnes relations commerciales avec les « sauvages » de cette région qui font la traite des fourrures. Il pense pouvoir assurer ainsi la protection des nouveaux territoires. Le marché des peaux connaît une expansion inédite et l’économie de la colonie est de plus en plus florissante. L’avenir s’annonce très prometteur pour la colonie.

Le recensement de 1681 établit la population de la Nouvelle-France à 9,710 personnes. En 1682, Louis XIV limite strictement les pouvoirs de Frontenac aux affaires militaires à cause de l’opposition croissante de la classe dirigeante (qui ne pense qu’à protéger ses acquis et ne veut rien bousculer), du clergé et des Jésuites.

Finalement le Roi se voit obligé de rappeler Frontenac en France. Mgr Laval redevient gouverneur-général de la Nouvelle France à tire provisoire. La Colonie se retrouve sans défense et en grand danger. L’expansionnisme a provoqué de nouvelles vagues d’attaques iroquoises qui déferlent sur les avant-postes français. De surcroît, l’amorce d’une nouvelle guerre en Europe, entre la France et l’Angleterre, n’améliore pas les choses.

En 1685 et pour quelques années, les colons sont conscrits dans la milice de la colonie pour aider à la construction de routes, de ponts et de fortifications (comme celle qui ceinture Montréal), car la Colonie, dont la population dépasse maintenant les 15,000 habitants, progresse rapidement. Il faut de nouvelles infrastructures pour assurer la sécurité, le transport des marchandises et la circulation des habitants entre Montréal et Québec, devenues de petites villes et Trois-Rivières où un village a été créé.

Le 4 août 1689, à Lachine, près de Montréal, les Iroquois massacrent un grand nombre d’habitants sans défense et détruisent plusieurs fermes. De plus, les Iroquois attaquent sans impunité car ils sont armés par les Anglais des colonies britanniques américaines qui les encouragent à harceler la Nouvelle-France par tous les moyens.

Louis XIV en a assez des attaques et du désordre qui se sont installés en Nouvelle-France et, face aux menaces grandissantes des Anglais, renomme Frontenac au poste de Gouverneur. Celui-ci arrive à Québec en octobre 1689. Dès janvier 1690, il envoie trois groupes de guerriers pour attaquer les frontières de la Nouvelle-Angleterre et ils remportent un franc succès.

Ces victoires redonnent espoir aux colons qui en sont ravis. Leurs familles vont pouvoir continuer à grandir et prospérer en paix.

Le 19 août, Frontenac apprend que Sir William Phipps, récemment nommé à la tête de la flotte anglaise, fait voile vers Québec. Ce dernier arrive le 16 octobre, avec beaucoup de retard et s’installe face à Québec avec une trentaine de bateaux. Alors que le messager de Phipps vient le sommer de rendre la ville, Frontenac répond par ces mots devenus célèbres : « Je n’ai point de réponse à faire à votre général que par la bouche de mes canons et à coups de fusils ». Après trois jours de résistance et un climat de plus en plus glacial, Phipps se résigne et rentre à Boston. Québec est sauvée !

 L’établissement de nouveaux postes de traite à l’Ouest continue. La paix est revenue et le vieux Frontenac voit ses projets d’expansion maintenant entérinés par Paris.

Pendant ce temps, en Europe, la France et l’Angleterre se font la guerre par intermittence depuis 1689. Le conflit a débuté parce que l’Angleterre et plusieurs autres États européens tentent de mettre fin à la puissance et à l’ambition de Louis XIV. Les Anglais visent aussi les monopoles français de la fourrure et du poisson d’Amérique en Nouvelle-France. En effet, entre 1678 et 1688, la pêche est si importante pour la France qu’elle y déploie quelques 20,000 personnes et 300 navires dans la moitié sud de Terre-Neuve et le long de la côte nord de la péninsule Northern. Pour sa part, le commerce de la fourrure augmente constamment et est de plus en plus profitable.

Malheureusement, à la surprise de tous, Frontenac tombe gravement malade. Il fait la paix avec l’Intendant et l’Evêque et il rend l’âme à Québec, le 28 novembre 1698. Il laisse derrière lui une Nouvelle-France très agrandie, prospère et pleine de projets, mais enviée par les Anglais. Quelques mois plus tard, le montréalais Pierre Lemoyne d’Iberville, mandaté par Frontenac à l’origine, fonde la Louisiane.

La Grande Paix

En 1701, la Grande Paix est signée à Montréal, avec les nations Iroquoises et plusieurs autres nations aborigènes. À ce moment-là, Montréal ville compte 1,200 habitants et est la capitale du commerce de la fourrure. En 1713, suite à la guerre de la Succession d’Espagne, la France est chassée des Pays-Bas espagnols et, avec la signature du traité d’Utrecht, elle est, entre autres, obligée de reconnaître les droits exclusifs de l’Angleterre sur tout le territoire de la Baie d’Hudson, ce qui donne aux Anglais accès au marché de la fourrure, en plus d’avoir à céder l’Acadie continentale (la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick). La Nouvelle-France subit pour la première fois une perte de territoire. Nonobstant ce revers, les années 1720-1730 apportent une forte prospérité à la colonie en raison de la croissance de la demande européenne pour le poisson, la fourrure, le bois et le blé. Le chemin du Roy est complété de Québec à Montréal et la distance peut maintenant être parcourue en 4 ou 5 jours.

En 1726, la population de la Nouvelle-France approche les 35,000 habitants. Elle est devenue, dans son temps, un empire territorial immense, qui s’étend de Terre-Neuve au lac Supérieur et de la Baie d’Hudson jusqu’au Golfe du Mexique. Deux facteurs ont contribué à son essor : son économie centrée sur le marché de la fourrure plutôt que sur l’agriculture et le fleuve Saint-Laurent, corridor navigable, qui permet de pénétrer au plus profond du continent. Et, pour protéger et contrôler ses territoires, la Nouvelle-France s’est donné un réseau de forteresses érigées aux endroits stratégiques.

La guerre de la Conquête et la guerre de Sept Ans

En 1738, un gisement de minerai de fer est découvert à Trois-Rivières. « Les Forges du Saint-Maurice » s’y installent. On y produira des marmites, des haches, des plaques de poêle, des clous etc… Les fermiers font des profits pour la première fois et de nouveaux venus se mettent à défricher de nouvelles terres à proximité des grands marchés. La construction navale devient une industrie importante. La population atteint les 55,000 habitants en 1754, dont 8,000 à Québec et 4,000 à Montréal. Pendant la même période, les 13 colonies anglaises américaines de la côte Atlantique enregistrent un important essor démographique. Leur population atteint les 1,5 millions d’habitants, sur un territoire beaucoup plus petit.

Plus le temps passe, plus les tensions sont fortes entre la France et l’Angleterre, particulièrement en Amérique du Nord. Finalement, la guerre, longtemps reportée, éclate en mai 1756. C’est le début de ce qui deviendra la Guerre de Sept Ans.

Les hostilités évoluent en une série de guerres mondiales, chacune des deux puissances européennes s’efforçant d’agrandir son empire au dépend de l’autre. Des monopoles très lucratifs sont en jeu : le sucre des Antilles, les esclaves d’Afrique, les soieries et les épices des Indes, les fourrures de la Nouvelle France et le poisson d’Amérique. Ce sont des guerres navales dont l’issue est scellée par la puissance des marines nationales.

Les citoyens de la Nouvelle-France sont inquiets du peu d’intérêt que le roi Louis XV porte à leur coin de pays. Les années qui suivent leur donneront raison.

L’Angleterre lance une offensive terrestre et maritime contre la Nouvelle-France. La forteresse de Louisbourg, sur l’île du Cap-Breton, tombe dès le début des hostilités.

En juin 1759, une imposante flotte britannique, qui servait sous les ordres du général James Wolfe, au détriment de l’armée française dirigée par le général Louis-Joseph de Montcalm dans le cadre de la guerre de Sept Ans, jette l’ancre près de Québec. Tout le territoire est en état d’alerte. La côte de Beauport, où les Français attendent un débarquement, est fortifiée. Comme le marquis de Montcalm semble vouloir rester sur ses positions à cet endroit, le général Wolfe décide de bombarder la ville afin de briser le moral des troupes françaises.

Le soir du 12 juillet 1759, le bombardement commence de façon très intense et rend la vie difficile aux habitants de la ville.

À la suite d’une victoire française sur la rive droite de la Montmorency, le commandant des forces britanniques, James Wolfe, tente le tout pour le tout : le 13 septembre, ses troupes débarquent à l’Anse-au-Foulon. Elles escaladent la falaise, occupent les hauteurs des plaines d’Abraham et remportent une victoire décisive sur l’armée française. Cinq jours plus tard, la capitale de la Nouvelle-France capitule. Deux mois de bombardement ont laissé le centre-ville dévasté (près de 80% de la ville est en ruine). Montcalm et Wolfe sont tués dans les premières heures de la bataille.

Photos de haut en bas: Monument à Mgr Laval, Frontenac, Notre Dame des Victoires, maison typique, la porte St-Louis, le fleuve St-Laurent à Québec, la murale des Québécois, les plaines d’Abraham.