La communion des sœurs malades


Jean-Claude est alors affecté à la communion des soeurs malades qui résident à l’hôpital de la maison mère. Il doit accompagner le prêtre qui va de chambre en chambre, tôt le matin, pour donner la sainte communion à chacune d’elles dans leur chambre respective. Pour ce faire, on le réveille avant les autres enfants vers 05:45, l’heure normale du réveil étant 06:30. Il s’habille rapidement, parcourre seul de longs couloirs sombres et interminables aux planchers de bois franc vernis qui résonnent à chacun des pas qu’il fait avec ses petits souliers pour se rendre à la sacristie de la maison mère et y rencontrer le prêtre. Il revêt son costume d’enfant de choeur et prend sa patène. Puis, précédant le prêtre revêtu de sa chasuble qui transporte sous un voile le ciboire rempli d’hosties consacrées, il suit une soeur qui ouvre la porte de chaque chambre. Il s’approche du lit et place sa patène sous le menton de la soeur malade qui sort aussitôt sa langue vers lui, au lieu d’attendre que le prêtre lui présente l’hostie.

C’est qu’il y a toujours un délai entre ce qu’il fait et ce que fait le prêtre. Langue après langue, Jean-Claude finit par ne plus voir que des langues de plus en plus affreuses et répugnantes les unes que les autres. Quel spectacle désolant chaque matin pour un enfant de 8 ans, à peine réveillé. Heureusement, il trouve un moyen de remédier quelque peu à ce triste spectacle quotidien. Si la langue sort trop vite et trop loin, il découvre qu’un léger coup de patène sur la gorge la fait rentrer aussi vite. C’est ainsi qu’il parvient pendant de longs mois à atténuer l’effet que lui produisent toutes ces langues horribles.