La guerre froide


Un nouveau sommet des chefs des états victorieux a lieu à Postdam, en juillet 1945. Roosevelt, mort en avril, est remplacé par le nouveau président américain, Harry Truman. Claude a toujours été fort impressionné par Roosevelt qui, comme les trois «grands», a été mis sur un piédestal par la presse et la population. Il ne croit pas que Truman fasse le poids devant Staline et Churchill. Ce n’est qu’une réaction d’adolescent, car il n’est pas ferré en politique. Mais il a quand même ses opinions. Pour lui, Truman, cet ex-agriculteur, ancien combattant de la 1ière guerre mondiale, devenu par la suite vendeur de cravates puis politicien, sénateur du Missouri et vice-président des USA pendant trois mois, n’est vraiment pas à sa place.

Alors que le sommet se déroule, les résultats de la première élection générale à se tenir en Grande-Bretagne depuis la fin de la guerre sont rendus publics. À la surprise du monde entier, Churchill et son parti conservateur sont emportés par un raz-de-marée électoral en faveur de son adversaire Clement Atlee. Leader du Parti Travailliste et social-démocrate, celui-ci devient Premier Ministre et sera dorénavant le négociateur pour la Grande-Bretagne. Claude est totalement abasourdi par cette nouvelle et n’en «croit pas ses yeux». Comment est-il possible que l’homme qui ait été le seul parmi tous les chefs d’états européens à se tenir debout devant les agissements d’Hitler, qui a organisé la défense de son pays, qui a préparé de main de maître la défaite du Führer et qui a su par ses mots maintenir le moral du peuple anglais lors des pire moments des bombardements sur Londres et les autres grandes villes du pays, comment est-ce possible qu’un tel homme puisse connaître la défaite aux urnes. Il s’agit, à son avis, d’un manque flagrant de reconnaissance. C’est une leçon dont il se souviendra toujours: il ne faut jamais compter sur la reconnaissance en politique.

Les États-Unis ont, depuis le dernier sommet, testé avec succès une bombe atomique dans le Nevada. C’est le fruit des efforts du ManhattanProject, auquel participent la Grande-Bretagne et le Canada. Truman annonce à Staline le succès des tests d’une nouvelle bombe d’une puissance extraordinaire, sans préciser qu’il s’agit d’une bombe atomique. Il espère que cette nouvelle le motivera à se montrer plus coopératif sur la question du sort de l’Europe. Staline accueille cette information avec flegme, sans poser de question. Il veut surtout obtenir une aide financière pour rebâtir le quart des immeubles et les 31,000 usines de son pays détruits par la guerre. Il recherche aussi des concessions en Europe et en Asie. Mais, à la différence de l’attitude conciliante dont ils avaient fait preuve à Yalta, les Alliés se montrent beaucoup moins réceptifs. En effet, maintenant que l’Allemagne est vaincue et qu’ils détiennent le secret de l’arme atomique, ils ont moins besoin de l’aide de l’URSS. Truman adopte donc la ligne dure sur les concessions demandées. Staline se sent trahi. Il est convaincu de la reprise de l’hostilité que l’on manifestait à l’Union Soviétique entre les deux guerres pour sa mise en place d’un régime communiste. Dès sa sortie de la conférence, il presse Kurchatov d’accélérer leur propre programme de recherche sur les applications militaires de l’énergie atomique. C’est l’amorce de la «guerre froide».